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Histoire des Juifs en Europe
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24 novembre 2009

QU'APPELLE-T-ON PENSER AUSCHWITZ ?

IMGLe livre d'Ivan Segré, Qu'appelle-t-on penser Auschwitz ?, fera certainement date dans l'histoire de la pensée de langue française de ce début de 21è siècle. C'est un livre de philosophie important qui interroge "la singularité du crime nazi" sous le nom désormais connu d'Auschwitz. Il s'agit bien de s'interroger sur la singularité du crime et pas seulement sur le crime nazi. En quoi ce crime est-il singulier et qu'en est-il de la pensée de cette singularité et de la pensée après la singularité d'Auschwitz ? Telles sont les lignes directrices de l'ouvrage.

Ivan Segré, son auteur, est docteur en philosophie et talmudiste, et réside en Israël. Ce livre forme avec La Réaction philosémite un diptyque dont il est le premier volet. 

Dans cet ouvrage, l'auteur interroge les textes théoriques contemporains — philosophiques (Ph. Lacoue-Labarthe et Alain Badiou, mais aussi Martin Heidegger et Hannah Arendt, Jean-François Lyotard, Emmanuel Faye, Derrida, Levinas), mathématiques (Jean-Yves Girard), psychanalytique (Daniel Sibony), idéologiques et antiphilosophiques (Éric Marty, Alain Finkielkraut, Jean-Claude Milner) — dans lesquels est abordée la question de la singularité d'Auschwitz. On ne peut que souligner l'extrême précision et l'extrême clarté du langage d'Ivan Segré dont la passion pour la pensée est communicative dès lors qu'on se met à le lire. D'emblée, il présente son hypothèse quant à la singularité d'Auschwitz :

"Notre hypothèse est que la question de la singularité d'Auschwitz se pose dans les termes d'une alternative. En effet, le crime nazi nomme essentiellement : ou bien la destruction des Juifs d'Europe (a) ; ou bien (b) l'invention des camps de Sobibor, Chelmno, Treblinka, Belzec, ou Auschwitz, soit l'invention d'un dispositif concentrationnaire dont les chambres à gaz sont la raison ultime : le camp d'anéantissement. En d'autres termes, le crime n azi est déterminé essentiellement, ou bien par sa fin : l'anéantissement des Juifs ; ou bien par son moyen : les chambres à gaz des camps d'anéantissement. Or cette alternative pose problème."

L'auteur explore ce problème à travers d'abord le commentaire de Philippe Lacoue-Labarthe dans La Fiction du politique où, dans le chapitre IV, Lacoue-Labarthe commente, en la trouvant "scandaleusement insuffisante", la phrase de Heidegger prononcée dans les Conférences de Brême (1949), contenue dans l'unique énoncé connu par Lacoue-Labarthe lors de la publication de son livre (1987), dans lequel Heidegger fait explicitement mention des chambres à gaz :

"L'agriculture est maintenant une industrie alimentaire motorisée, quant à son essence la même chose que la fabrication de cadavres dans les chambres à gaz et les camps d'extermination, la même chose que les blocus et la réduction de pays à la famine, la même chose que la fabrication de bombes à hydrogène."

Mais la discussion autour de la pensée de la technique chez Heidegger au sujet des chambres à gaz ne s'en tient pas là et aborde le deuxième et dernier texte, découvert et traduit (mais la traduction n'est pas sans poser problème) par Emmanuel Faye, où Heidegger mentionne à nouveau les chambres à gaz ; il s'agit toujours d'un texte des Conférences de Brême, mais dont l'une (prononcée également en 1949) était restée inédite jusqu'à sa publication aux éditions Klostermann, en 1994. Voilà la traduction que propose Emmanuel Faye de ce texte de Heidegger (la phrase litigieuse est mentionnée entre parenthèses en allemand et la traduction d'Ivan Segré en est alors proposée) :

"Des centaines de milliers meurent en masse. Meurent-ils ? Ils périssent. Ils sont tués. Meurent-ils ? Ils deviennent les pièces de réserve d'un stock de fabrication de cadavres. Meurent-ils ? Ils sont liquidés discrètement dans des camps d'anéantissement. Et sans cela — des millions périssent aujourd'hui de faim en Chine. Mourir cependant signifie porter à bout la mort dans son essence. Pouvoir mourir signifie avoir la possibilité de cette démarche. Nous le pouvons seulement si notre essence aime l'essence de la mort ("Wir vermögen es nur, wenn unser Wesen das Wesen des Todes mag" : Nous le pouvons seulement si notre essence peut l'essence de la mort - traduction d'Ivan Segré). Mais au milieu des morts innombrables l'essence de la mort demeure méconnaissable. La mort n'est ni le néant vide, ni seulement le passage d'un étant à un autre. La mort appartient au Dasein de l'homme qui survient à partir de l'essence de l'être. Ainsi abrite-t-elle l'essence de l'être. La mort est l'abri le plus haut de la vérité de l'être, l'abri qui abrite en lui le caractère caché de l'essence de l'être et rassemble le sauvetage de son essence. C'est pourquoi l'homme peut mourir si et seulement si l'être lui-même approprie l'essence de l'homme dans l'essence de l'être à partir de la vérité de son essence. La mort est l'abri de l'être dans le poème du monde. Pouvoir la mort dans son essence signifie : pouvoir mourir. Seuls ceux qui peuvent mourir sont les mortels au sens porteur de ce mot."

C'est un texte fondamental de Heidegger qui essaie de penser la mort de la mort dans les camps de la mort. Les Juifs, nous dit en substance Heidegger, ont été privés de leur propre mort en étant liquidés en masse dans les chambres à gaz. Mais ces propositions sont longuement et passionnément discutées par l'auteur, car elles ne vont pas de soi au regard de la pensée de la mort dans la pensée de Heidegger lui-même. 

La discussion philosophique s'élargit dans la dernière partie (IV) de l'ouvrage à la problématique du nom juif qui oppose Alain Badiou à Jean-Claude Milner. 

 

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Commentaires
T
née catholique puis les reflexions se surpassant les unes aux autres j'ai considérée que croire devait en ma fonction 1ere de chrétienne d'etre protestante ( sans action aucune) puis juive puisqu'ils avait annoncés au monde 1 seul dieu ( chouette plus de guerre pour savoir lequel preferer." façon de parler 'penser'." Et enfin la reconnaissance à mon petit niveau de la science. Tout bascule HEUREUSEMENT LA CONCRETISATION DE MES DOUTES ARRIVANT ENFIN A DEVENIR DEFINITIVEMENT ATHEE.Mais AUSCHWITZ DOIT OBLIGATOIREMENT RESTER MEMOIRE HUMAINE S'IL EN EST.
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